Publié le 19/01/2023 sur 18h51.
, mis à jour le 19/01/2023 à 18h51.
Dans la nuit de mercredi à jeudi, l’Assemblée nationale a adopté l’ouverture de « l’accès direct » des patients aux infirmières en pratique avancée (appelées IPA). Une mesure qui ne convainc pas les médecins généralistes.
Des IPA, pour qui et pour quelles raisons ?
Il faisait partie de l’arsenal de mesures visant à lutter contre les déserts médicaux et à améliorer l’accès aux soins dans la région. Dans la nuit de mercredi à jeudi, l’ouverture de « l’accès direct » des patients aux infirmières en pratique avancée, les AIP, sans passer par la case médecin, a été votée en première lecture par les suppléants avec 62 voix contre.
Le statut des infirmiers en pratique avancée, créé via la loi Touraine de 2016 et un décret en 2018, vise notamment à réduire la charge de travail des médecins en élargissant les compétences de certains infirmiers sur des pathologies ciblées. Cependant, leur déploiement est encore très limité, principalement en raison d’un nombre insuffisant de patients qui leur sont adressés par les médecins généralistes. L’article adopté vise ainsi à revaloriser ce statut en permettant désormais « aux patients de s’adresser directement à ces paramédicaux sans passer en amont par un médecin », mais dans le cadre d’un « exercice coordonné » avec ce dernier.
Des médecins généralistes inquiets de cet accès direct
Selon le décret de 2018, la pratique avancée couvre :
Pourtant, la mesure, qui vise à terme à simplifier l’accès aux soins, ne convainc pas les médecins généralistes. L’association des médecins praticiens MG France dénonce même un texte « dangereux et inadapté » qui met en garde contre « une médecine dans laquelle les professionnels de santé sont interchangeables sans aucune considération pour la qualité du traitement ».
Pour le Dr. Fabien Quedeville, médecin généraliste consulté par Doctissimo, la question qu’il faut se poser en priorité est « est-ce une bonne ou une mauvaise nouvelle pour les patients ».
« On peut comprendre qu’à certains endroits on puisse avoir des difficultés à accéder aux soins, et que pour certains soins bien définis on puisse avoir recours à d’autres professionnels, ça ne me choque pas. Malheureusement, on voit déjà que dans la délégation des tâches (un frottis avec une sage-femme par exemple) il n’y a plus forcément de lien avec le médecin traitant, le suivi n’est pas effectué. Il me semble donc important de définir les compétences de chacun, et de ne pas enlever encore et encore des compétences aux généralistes ».
Le médecin craint également une désorientation des patients avec cette opération :
Un mauvais diagnostic fait par le gouvernement ?
« Pourtant, j’espère que la population ne confond pas tout et n’oublie pas que lorsqu’on a un problème de santé, c’est son médecin qu’il faut voir avant d’aller chez une infirmière ou un médecin kiné ».
Pour le dr. Pour Guillaume Barucq, médecin généraliste à Biarritz, la mesure n’est pas non plus la bonne dans le contexte actuel d’accès aux soins.
« Le gouvernement s’est trompé de diagnostic. Ce que nous demandons depuis des années, c’est d’être allégés de la charge administrative afin de mieux soigner nos patients. Mais cette mesure va nous soulager d’un temps de médecin que nous aimerions conserver », a-t-il ajouté. critique.
Il craint aussi un impact négatif à long terme sur la santé des Français :
« C’est même dangereux, rappelle-t-il, on est formé à Bac+10 pour faire des diagnostics. On nous dit aujourd’hui que les IPA à Bac+5 offriront le même niveau de service. D’autant que je suis dans une collaboration totale entre professionnels de santé suivis, les responsabiliser pour diagnostiquer et prescrire me paraît délicat. Au quotidien on est capable de dépister un mélanome chez un patient qui vient pour une bronchite, pourront-ils faire ça aussi ? »