En mai 1932, le naufrage du « Georges Philippar », miroir d’un …

Photo of author

Rédactrice passionnée qui a vécu dans plus de 25 pays toujours à la recherche de la dernière information.

Dans la nuit du 15 au 16 mai 1932, vers 1h30 du matin, un incendie se déclare à bord du Georges Philippar. Le navire, dernier né de la flotte des Messageries Maritimes et fleuron de la technologie française, effectue son voyage inaugural sur la Ligne Est C’est Loin. A ce moment il aperçoit le cap Guardafui.

Georges Philippar brûle rapidement. L’équipage a combattu l’incendie jusqu’à 4h30 du matin, avant d’abandonner le navire à l’aube. Pendant trois jours, le cadavre se décompose et dérive, finissant par couler à plus de 2000 mètres de profondeur.

Le bilan officiel fait état de 41 victimes, dont 35 en première classe, là où l’incendie s’est déclaré. Le décompte reste cependant incertain, avec des passagers de pont (quatrième classe) et quelques membres d’équipage portés disparus. Parmi les victimes, le célèbre écrivain Albert London, revenu d’un reportage en Chine.

Comme toutes les épaves, le Georges Philippar fascine parce qu’il est l’exemple d’une société en général. Quatre-vingt-dix ans plus tard, il existe deux récits écrits à ce sujet. En mars dernier, l’écrivain de l’Académie Goncourt Pierre Assouline publiait Le Paquebot, dans lequel il dressait à l’aide de l’appareil photo le portrait d’un Européen en décadence. Récemment, l’écrivain Frédéric Kinder et le dessinateur Borris ont donné une histoire drôle au nom clair : Albert Londres Must Go.

Théories complotistes

Pour les commentateurs de l’époque ainsi que les écrivains suivants, une histoire particulière ne peut être causée par le hasard. Le sens de la tragédie humaine doit être profond. Une grande partie de la théorie a alors prospéré, largement diffusée par une presse qui a entretenu les préoccupations de son temps. Le naufrage est plus qu’un « miroir de nos peines » pour reprendre le beau titre de l’auteur Pierre Lemaître.

Le Petit Oranais a rapidement tissé des liens entre la catastrophe et l’assassinat du président Doumer moins de dix jours plus tôt, manifestement l’œuvre de l’Union soviétique. Dans un article aux symboles racistes, le journal Victoire affirme que sur les 347 membres d’équipage, 184 étaient chinois, et qu’une telle chose ne pourrait jamais arriver à un « équipage égal », parfaitement entendu en français. Et punir aussi le laxisme des syndicats maritimes sous les ordres de Moscou. Le Drapeau y voyait une « attaque calomnieuse contre la France flottante » par la Chine et parlait du déclin du prestige international français.

Cela affecte les médias étrangers. Le Daily Mail est vu comme une activité de la cellule communiste de Colombo, ce à quoi le Times de Ceylan a répondu qu’il ne s’agissait que d’un stratagème du propriétaire du journal londonien, Lord Rothermere, pour servir ses intérêts politiques. La psychose règne aussi : selon le New York Sun, le gouverneur général de l’Indochine, Pierre Pasquier, allait voyager sur le Georges Philippar avant de se raviser à la dernière minute. Il y avait alors à bord 336 pièces d’or de la Banque de l’Indochine ; En fait, c’est une évidence pour ceux qui ont l’habitude de côtoyer les connaissements des Messageries Maritimes.

Plus précisément, le magazine conservateur Nouvelles littéraires a profité de la crise pour s’interroger sur « le sophisme de l’électricité », et L’Astrosophie a conclu un exemple troublant en disant « effrayant, les bolcheviks s’en mêlent (et suivent) les consignes données par un Allemand ». La machine créative est en route, motivée par des croyances intimes et des faisceaux d’événements aléatoires, qui ne manqueront pas de causer des problèmes.

Les disques de French Lines & La société, au Havre, tient à jour 23 cases d’informations techniques et de règles liées à l’incident. Douze années de procédures ont suivi le naufrage, au cours desquelles l’événement a été enquêté avec précision pour déterminer les causes et les responsabilités. Des centaines d’informations et de rapports spéciaux sont en cours d’analyse pour enfin ébranler l’enquête sur l’attaque. Mais ils reviennent sans cesse à ce jour.

À Lire  Croisière Croisière : Exploris, société française, lance...

A propos de la fin tragique d’un autre paquebot, le Normandie dans le port de New York en 1942, le réalisateur Tal Zana a récemment sorti un documentaire qui examine en profondeur l’histoire et la naissance des théories du complot. La mécanique est plus ou moins la même : médiatisation et inquiétudes, urgence et, après la catastrophe, tissage d’une toile qui choisit et relie les événements en une seule chose, l’attentat. .

Sur le même sujet :
De Sudouest.fr avec AFP Publié le 14/10/2022 à 9h48Navires bloqués à leur…

L’installation électrique en cause

C’est plus banal, la description du bateau court n’en est pas moins intéressante à voir. Sans entrer dans des détails qui comptent de nombreuses pages de compétences techniques, l’installation de l’électricité du bateau est loin d’offrir la meilleure sécurité. Lors du voyage à l’étranger, il y avait déjà de nombreuses plaintes concernant les dysfonctionnements et, quelques jours avant l’accident, un incendie s’était déclaré près de la piscine.

La comparaison avec le Titanic a parfois été tentée par la presse française. Au total, la guerre ne manque pas : les deux navires sont le fruit d’une foi aveugle dans les nouvelles technologies, une sorte de fierté de nations sûres d’elles et de leur emprise sur les éléments.

Georges Philippar rassemble l’essentiel de sa chute : une puissance électrique cachée derrière les boiseries. Une arche qui a été accidentellement enlevée pendant les travaux, peut être le brûleur lent de l’histoire, qui a été soufflé avant la première alerte. De plus, le système est destiné aux tapis de cuir des vapeurs toxiques qui ont joué un rôle négatif, mais aussi aux vernis de nouvelle génération, faciles à utiliser, pas chers et agréables, mais très inflammables.

La nuit de l’incendie, pour calmer la chaleur de l’océan Indien, les rues et les bâtiments sont ouverts pour faciliter la brise. L’arrivée de l’air, ajoutée aux parties de l’air du navire coupées tardivement, l’absence de réponse de l’équipage dans un premier temps, le bruit sourd des signaux d’avertissement, mais aussi dans le bateau qui mène à un cul. -de-sac sur le siège D de nombreux éléments qui expliquent la rapidité de la propagation du feu et le fait que de nombreux passagers de première classe ont été pris dans leurs cabines.

La vérité est qu’il est plus intéressant d’écrire une attaque ciblée sur la tactique puisqu’il n’y a pas de victimes de deuxième et troisième partie. Cette déclaration revient fréquemment devant les tribunaux, comme une insulte à l’ordre normal. Sur un registre des victimes tenu par les Messageries Maritimes, les travailleurs – les sujets politiques – ajoutent leurs mains à la fin, comme un signe.

La cristallisation des angoisses d’une époque

Au milieu de toutes les conspirations il y a aussi la possibilité que l’attentat ait été fait pour empêcher Albert Londres de rentrer en France avec le contenu de ses études chinoises qui risque d’exploser. Une explication, comme d’autres, relève de l’eurocentrisme et d’une préoccupation coloniale commune, sans tenir compte du caractère dangereux d’une telle opération. Car si l’écrivain périssait dans le naufrage, il lui resterait peu de temps à vivre, comme la plupart des passagers. Le feu a attaqué jusqu’au pont D, Albert Londres a essayé de sortir par la porte de sa cabine. L’ingénieur Maurice Sadorge lui lance une lance à incendie mais, pressé, l’écrivain ne tarde pas à le laisser pendre et tomber à l’eau. Il ne savait pas nager.

Dans une situation de conflit entre les superpuissances et de crise internationale, l’Europe est confuse. La catastrophe maritime comme la mystérieuse enquête d’Albert Londres peuvent confirmer les craintes d’une époque. Le 27 mai, le journal d’extrême droite Action française attise les flammes : « Dantzig ? Moukden ? Comme Georges-Philippar, le monde va-t-il brûler ? »