Ce long métrage inachevé décrit la relation ambiguë entre un surveillant de camp et un détenu à Auschwitz.
Andrzej Munk émerge dans le dégel post-stalinien comme l’une des grandes figures du nouveau cinéma polonais, aux côtés d’Andrzej Wajda, Wojciech Has, Jerzy Kawalerowicz. La phrase est parfaite pour un dictionnaire de cinéma, mais on n’engagera pas un euro sur le fait qu’elle parle à beaucoup de monde en France, où son travail reste méconnu. Et pour une bonne raison. Décédé en 1961 à l’âge de 40 ans dans un accident de voiture, alors qu’il tournait ce qui allait devenir son dernier film, Le Passager, Munk est le fantôme élégant et grinçant du cinéma polonais. Formé à l’école de cinéma de Lodz à la Libération, cet homme surdoué enchaîne les documentaires dans la lignée du réalisme socialiste avant de passer en 1956 à une fiction qui les démantèle. Dans les quatre années qu’il lui reste à vivre, il signe Un homme en route (1956), Eroica (1958), De lavain à renvoyer (1960).
Dans l’attente sans cesse déçue de les revoir un jour en salles en France (on peut cependant les retrouver en DVD chez le précieux éditeur Malavida), il est assez simple de les décrire. Contrairement à Wajda, qui ne cesse, dans quelques films sublimes d’ailleurs, de célébrer le romantisme lyrique et sacrificiel de la nation, Munk, étant de l’autre côté du miroir polonais, n’aime rien tant que banaliser la tragédie, par la distance, l’absurde , le grotesque. Peut-être a-t-il fallu avoir vécu caché comme Juif à Varsovie pendant la guerre – c’est-à-dire dans l’abandon absolu de toutes les forces présentes – pour se permettre cette largesse. L’hitlérisme, le stalinisme, l’héroïsme, le stoïcisme lui passent dans la casserole d’une histoire que personne ne célèbre, celle des perdants. On ne cherchera pas plus loin, s’il n’y en avait qu’un, le maître venu de Pologne du jeune Roman Polanski.
Munk est le fantôme élégant et grinçant du cinéma polonais
Le cas de « La Passagère » est épineux. D’abord parce que c’est un film inachevé. Ensuite parce que son action se déroule à Auschwitz, bourbier cinématographique s’il en est. C’est en 1959 que le cinéaste entend à la radio une pièce radiophonique intitulée Passagère de la cabane 45. Ce récit autobiographique, interprété notamment par l’actrice Aleksandra Slaska, est écrit par Sofia Posmysz, une ancienne résistante, membre de l’armée de l’intérieur pendant la Occupation, déporté en 1942 à Auschwitz à l’âge de 19 ans. Munk décide d’adapter le texte de ce rescapé, reprenant Slaska dans le rôle de Liza, une ancienne surveillante allemande du camp qui, alors que de nombreuses années plus tard au bras de son mari sur un paquebot transatlantique, voit embarquer Marta (Anna Ciepielewska), une détenue avec qui elle a noué une relation privilégiée.
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