Maisons Phénix : « Il y a un trou dans notre terrain et notre budget »

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Written By Sophie Ledont

Rédactrice passionnée qui a vécu dans plus de 25 pays toujours à la recherche de la dernière information.

La faillite de Geoxia entraîne l’interruption des chantiers de construction de pavillons et laisse les acheteurs dans l’angoisse, qui pointent également des retards et des malfaçons.

Une maison Phénix ou Castor, un toit au-dessus de la tête, pas de loyer ni de voisin, un bout de jardin pour les enfants et des barbecues le dimanche. C’était le rêve à crédit d’un accès facile à la propriété individuelle pour presque tous les budgets. Le début ou l’achèvement d’une vie de famille. Rencontre avec des clients du groupe Geoxia, pour qui tout s’est effondré. Si les murs sont debout, parfois avec un toit, l’aventure de la maison pour tous s’arrête là.

« A chaque fois, il y avait un prétexte pour décaler la date du chantier », Emilie Beaufils, 35 ans, secrétaire, Clisson (Loire-Atlantique)

« Nous avons choisi notre maison Phénix pour la rapidité de construction, ce ne sont pas des blocs de béton, mais des dalles de béton montées sur une structure métallique, à la manière d’un ensemble Lego. Et aussi pour son prix. On ne roule pas sur l’or, les maisons Phénix, ce sont des habitants aux moyens modestes. Il nous a coûté 135 000 euros pour 112 m² habitables. Nous avons trois enfants, nous avons besoin de place pour accueillir tout ce petit monde.

Tout allait bien jusqu’à ce que nous nous renseignions sur la cuisine équipée. Dans le séjour cuisine ouverte, si on met la cuisine, on ne met plus le canapé. Il n’y avait que 30 m². Nous avons dû déménager la cuisine dans la buanderie. Pendant le confinement, on s’est dit qu’on voulait une vraie cuisine, dans une extension. Nous nous sommes tournés vers Phénix Evolution, filiale de Geoxia. Nous pensions qu’ils connaissaient leurs maisons.

Les travaux d’extension devaient démarrer en septembre 2021. Nous avons versé un acompte de 16 000 euros sur les 57 000 euros du devis. Mais en septembre, le maître d’œuvre nous a appelé pour nous dire qu’il n’avait pas de maçon, que les travaux commenceraient en octobre. A chaque fois, il y avait un prétexte pour décaler la date du chantier, qui n’a jamais commencé. Ceux qui construisent ont de la chance, ils ont une garantie de livraison de la maison que nous n’avons pas pour une extension. Nous sommes dans le chou, et notre argent avec.

« Tout le second travail reste [à finir], celui qui coûte le plus », Julien Thompson, 27 ans, ingénieur en informatique, Nantes (Loire-Atlantique)

« Pour des jeunes comme nous, l’ancien n’est pas accessible, alors on a voulu construire, avec mon compagnon. Nous avons signé en janvier 2021 pour une maison de 130 m², pour 185 000 euros. Nous avons eu beaucoup de problèmes, par exemple nous avions trois chefs de chantier différents. Nous avons dû multiplier les demandes de permis de construire, car leur bureau d’études faisait erreur sur erreur. En juillet 2021, une entreprise débarque sur le terrain : ce que nous voulions ne correspondait pas du tout à son plan et à ce qu’il s’apprêtait à creuser. Arrêt immédiat du chantier, et quatre mois de retard sur son lancement.

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A ce jour, nous avons débloqué 80 000 euros, et nous avons une maison avec trois semaines de main d’oeuvre, des murs, un toit, sans gouttières, et de la mauvaise facture. Il reste tout le second œuvre, les menuiseries, les sols, les plaques de plâtre, l’installation électrique, la pompe à chaleur qui est la plus chère. Depuis janvier, il n’y avait plus personne sur le chantier, l’entreprise était en conflit avec les sous-traitants, qui n’avaient pas été payés depuis un an. Pour le moment, nous avons reçu des emails automatiques d’Imhotep, notre garant, avec un lien vers une plateforme pour consolider tous les documents clients. Nous avons tout, mais nous nous demandons à quelle vitesse et à quel prix nous aurons notre maison. Nous pouvons payer jusqu’à 5% de plus sur notre site selon notre contrat. Nous avons été obligés de quitter notre location pour créer un fonds d’urgence. Notre famille nous accueille gracieusement.

« Nous avons un trou dans notre terrain et un trou dans notre budget », François Pain, 44 ans, dessinateur industriel (Yvelines)

« Nous avons signé un contrat avec Maison familiale il y a deux ans et demi, une maison de 214 m² dans un village des Yvelines, pour 280 000 euros. Nous avons eu un refus de permis de construire car personne n’avait lu les documents du plan d’urbanisme. Entre les deux, le coefficient de surface au sol a changé, il a été divisé par deux, ce qui nous a obligés à passer d’une maison à un étage à une maison à deux étages. Puis, j’ai découvert dans le document de risques géologiques qu’une coulée de boue avait traversé tout mon terrain, et qu’il fallait surélever la maison avec des blocs de béton, ce qui nécessitait un permis de construire rectificatif.

Un mois avant le placement en redressement judiciaire, Geoxia m’a annoncé que le chantier allait démarrer et a demandé l’appel de fonds. Je me suis dit, super. J’ai attendu que le creuseur soit au sol pour débloquer l’argent. Il creusait pour les fondations et il m’a dit qu’il n’avait pas de bon de commande. Je lui ai demandé de tout arrêter. Nous avons donc un trou dans notre terrain, et un trou dans notre budget, de 43 000 euros, somme qui aurait dû être utilisée pour les fondations, le vide sanitaire et la dalle du rez-de-chaussée. Normalement, le garant désignera un autre constructeur, ou nous reversera les 43 000 euros, si nous passons par quelqu’un d’autre. Nous avons fait faire un devis, il y a un surcoût de 40 000 euros, à cause de l’envolée du coût des matériaux. Nous avons rendez-vous avec notre banque, pour voir si elle va nous suivre. Si Geoxia avait bien fait son travail, notre maison aurait été incluse dans nos prix.