Marseille : anti-croisière sur le pont

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Written By Sophie Ledont

Rédactrice passionnée qui a vécu dans plus de 25 pays toujours à la recherche de la dernière information.

Une manifestation est prévue le 11 juin à 14 heures, place Bargemon (2e)

« Trois cent soixante-deux mètres de long, 10.000 passagers, 15 piscines, une tyrolienne de 24 mètres, une patinoire, un parc nature, 35 bars, dont un avec des robots barmans dansants… » : préambule, redondant. Un collectif anti-croisière a décidé de détailler les animations spectaculaires sur le Wonder of the Seas, le plus grand navire de croisière de la Royal Caribbean Cruise Line, qui a transité par Marseille plus tôt cette année. « Des biens d’exception dans un contexte de crises écologiques dévastatrices : il n’est pas nécessaire d’écrire une thèse pour comprendre l’absurdité de ce type de construction et le cynisme de ceux qui défendent encore cette activité », déclare la nouvelle unité marseillaise.

Les « escales croisières » sont avant tout une démarche multi-initiatives. Habitants de Saint-Henri, Saint-André, Estaque, associations (Zero Fossil, Alternative, Extinction Rebellion…). Dans les petites salles de la rue Pierre-Roche (4e), une quinzaine de représentants s’étaient mis d’accord avec la presse autour de leur logo, qui représentait un paquebot dégageant une épaisse fumée noire. « L’idée du collectif est née pendant l’incarcération, car à Marseille, comme ailleurs, la nature se réveillait, la pollution diminuait. Sauf pour les quartiers nord, où il y avait 16 bateaux à quai, ces habitants respiraient encore plus mal. . Et le ras-le-bol est devenu général », s’ouvre le collectif.

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le publier le 26/05/2022 à 07h00, mis à jour le 26/05/2022 à…

« Tous les voyants sont au rouge, il est temps que ça change. »

Un petit livret contient un résumé de 25 pages des conclusions et des revendications. « Tous les voyants sont au rouge : pollution de l’air, pollution marine, émissions de gaz à effet de serre, consommation de ressources, fraude fiscale pratiquée grâce à ces paquebots et le manque réel de droits pour les personnes travaillant à bord, les revendications collectives. Il est temps de changer ça. » « 

Et ce sont précisément la législation et la réglementation qui changent. Mais les scrubbers (lavage des fumées), l’utilisation du gaz naturel liquéfié (GNL), le choix de l’hydrogène… ne restent pour les combattants qu’une expression de « greenwashing hypocrite ». Et la condamnation d’un paquebot allemand par un tribunal de Marseille mardi à payer 60 000 € après avoir testé plus de 1,5 % de soufre en 2018 ? « Anecdote. Si vous savez que seuls 250 contrôles sont effectués par an sur l’ensemble du littoral méditerranéen », répond le collectif. Ce dernier pointe dans l’index Dubrovnik, qui restreint le passage des bateaux de croisière depuis 2019, ou Venise, qui leur interdit de naviguer dans le centre-ville depuis l’an dernier. « Même à Palma de Majorque, la ville de l’industrie des croisières, le trafic est juste limité », protestent les militants. A Marseille, les regards se tournent vers les discussions et les décisions du Grand Port Maritime (GPMM). « Les élus ont le devoir de peser sur cette instance, dont ils ne font que très peu, cela doit être reconnu », ont-ils lâché.

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Le 11 mai, une vingtaine de membres d’Extinction Rébellion se sont réunis à 6h45 sur les quais de Bordeaux pour laisser les passagers d’un paquebot de luxe géant de Silversea cruises. Accompagné par la voix de Batucada, l’action impétueuse a été prise pour sensibiliser et mettre en garde contre la pollution causée par ce type de paquebots. « En ce moment, nous travaillons sur la centralisation du travail et des efforts, nous ouvrons une discussion avec les acteurs du secteur, les élus et nous continuerons à informer la population », précise le collectif.

Déjà le 11 juin (14h) une manifestation est prévue, place Bargemon (2e).

Le commentaire de Jean-François Suhas président du Club de la croisière : « Ma porte est ouverte »

Jean-François Suhas, Président du Cruise Club, a observé vendredi la création du collectif « Stop croisières » grâce à leur diffusion en direct sur les réseaux sociaux… « Quand j’entends qu’aucun bateau n’est contrôlé… Ce n’est pas ça C’est possible d’entendre. La transition écologique, on l’a depuis quelque temps mise en place et soulignée », explique-t-il.

Vendredi, des militants ont regretté que l’une des pierres angulaires du plan de réduction de l’empreinte carbone élaboré par le GPMM soit l’électrification des quais, retardée par le port de Marseille. L’électrification progressive des postes à quai, qui permettrait aux navires de croisière de se connecter lors de leurs escales d’ici 2025 et ainsi de ne plus consommer l’électricité produite par leurs moteurs. « Oui, le dispositif est effectivement en retard, même si nous avons été l’un des premiers ports à connecter les bateaux. Mais nous allons continuer à travailler », confirme Jean-François Suhas. Quand des militants s’interrogent sur le modèle économique et social de la croisière ainsi que sur l’impact du tourisme sur la ville, exigeant l’arrêt du secteur, le président du Cruise Club soupire encore. « Il faut trouver la bonne voie. Je me justifie en faveur de la croissance et je suis à nouveau ouvert au dialogue avec les membres du collectif. Mais on ne peut pas se fier à des chiffres qui sont faux. Aujourd’hui, les croisières à Marseille emploient 2 500 personnes. 2019, ils ont rapporté 450 millions d’euros pour la ville et le port ». Mais il faudra encore quelques années avant que les croisiéristes retrouvent leurs rythmes d’avant Covid. Les bateaux sont toujours sous réglementation sanitaire et la guerre en Ukraine n’a pas encouragé réservations. Pourtant, les imposants paquebots ont commencé à faire escale à Marseille. « Aujourd’hui, tout dans une croisière est pensé et conçu pour que les touristes à bord consomment : animations, loisirs, services, restauration… Quand la CCI fait signe à un certain nombre selon lequel chaque passager à terre dépense en moyenne 50 euros, c’est assez opaque. ! C’est un bilan mouillé », assène le collectif.

Quant à Jean-François Suha, il réitère son invitation : « Ma porte est ouverte ».