Ancien troisième ligne de Biarritz et Castres, Steve Malonga a interrompu sa carrière à 29 ans, après 2 ans de galère à Agen. Aujourd’hui chef d’entreprise, il s’est reconverti avec brio.
Simon Galinier
Publié le 15 juillet 22 à 17h46
De la grande distribution à la rénovation
Il fait partie de ces joueurs professionnels qui se sont retrouvés coincés en plein vol avec des blessures à répétition. Grand espoir du rugby français à la fin des années 2000, champion du monde U21 2006, le troisième ligne Steve Malong a disputé son dernier match professionnel à tout juste 27 ans, il y a 10 ans. Reconnu inapte deux ans plus tard, il est contraint à l’abandon après deux saisons blanches avec Agen. Actu Rugby l’a trouvé pour découvrir qui il était devenu et revenir sur les moments forts de sa carrière. Rencontrer.
Retraité du rugby professionnel depuis 8 ans, Steve Malonga, 37 ans, a dû se requalifier plus vite que prévu après avoir interrompu sa carrière de rugbyman professionnel. L’ancien flanker a choisi Castres plutôt que Biarritz, d’où est originaire sa femme et où il a débuté sa carrière professionnelle.
« Sur les trois clubs que je connais, Castres était celui où je me sentais le mieux et on avait tous nos amis et notre réseau ici », explique l’intéressé. « A l’époque, j’hésitais entre l’immobilier et la grande distribution car je me suis lié d’amitié avec le patron de Super U à Soual (Tarn) lorsqu’il a ouvert son magasin en 2009. J’ai aimé le projet, j’ai vu le supermarché grandir et ça m’a donné envie d’ouvrir une épicerie, U Express, alors je me suis lancé. »
En 2014-2016, il anime ainsi plusieurs formations internes au sein du groupe Système U et approfondit son expérience dans les magasins de proximité de Sorèze (Tarn), Castelginest (Haute-Garonne) et… Agen (Lot-et-Garonne), train et apprendre le métier. « D’ailleurs, à cette époque il n’y avait pas de magasins à reprendre ou à créer, alors le responsable de Super U à Soual, Thierry Mitou, m’a ordonné d’intégrer le rayon fruits et légumes pendant 3 ou 4 mois avant d’être nommé responsable de magasin de 2016 à 2019 Il est donc en charge de s’occuper de la direction commerciale et des employés du supermarché « J’ai eu la chance d’être dans une bonne structure donc les tâches étaient bien réparties », se souvient Malonga.
« Je me suis aperçu que je n’étais pas fait pour la grande distribution »
N’ayant pas les ressources financières suffisantes pour acheter ou créer sa propre boutique, préfère ne pas prendre le risque d’entreprendre un tel projet. « De plus, je travaillais 70 heures par semaine au Super U de Soual, j’avais la tête sur le volant, et je ne voyais plus très souvent mes enfants et ma famille, alors j’ai préféré renoncer à la grande distribution. »
Se voulant totalement indépendant, Steve Malonga s’est tout naturellement lancé dans la création de son entreprise de construction et de rénovation en octobre 2020, après une brève formation à l’Afpa d’Albi. « J’étais un passionné de bricolage et j’ai toujours été attiré par le travail manuel. Pendant mes deux années de convalescence à Agen, je rénovais la maison et bricolais pour tuer le temps, car le temps n’était long qu’au gymnase… »
« J’ai beaucoup de regrets et de frustration sur ma fin de carrière… »
L’ancien flanker s’est très vite sali les mains et sa société Malonga Rénovation a rapidement décollé. « Dès le début, j’avais de gros projets à gérer et tout se passait bien. Aujourd’hui, après presque deux ans d’activité, je m’interroge sur le développement et l’emploi, car pour l’instant je suis tout seul. Plomberie, plâtrage, électricité, peinture, réparations… Je fais tout sauf la grosse maçonnerie », souligne l’ancien flanker qui s’épanouit dans ce secteur professionnel, étant son propre patron pour lequel il a toujours lutté. « Avec le recul, j’ai compris que je n’étais pas fait pour la grande distribution. Aujourd’hui je suis beaucoup plus contente de ce que je fais et cela me procure beaucoup de plaisir… Mon dos ne l’est pas, mais je le suis ! « , des rires.
Très enthousiasmé par cette aventure entrepreneuriale, Steve Malonga avoue s’être complètement coupé du rugby, sans aucun regret : n’est-ce pas. J’ai été vraiment traumatisé par toutes mes blessures qui m’ont fait arrêter. J’ai beaucoup de regrets et une vraie frustration que je n’ai toujours pas réussi à surmonter à la fin prématurée de ma carrière. Je pense que j’aurais pu jouer plus longtemps puisque je n’avais que 27 ans quand j’ai disputé mon dernier match officiel… »
Son dernier match professionnel n’était rien d’autre que les éliminatoires du Top 14 entre Castres et Montpellier (31-15) en 2012 au stade Ernest-Wallon de Toulouse. Ce jour-là, il a remplacé feu Ibrahim Diarra, blessé, et à peine 10 minutes plus tard, victime d’une rupture des ligaments croisés du genou gauche. Le plus gros coup dur de sa carrière. « Deux ou trois semaines plus tôt, je me souviens que mon genou s’est tordu bizarrement sur le matériel et je pense qu’il s’est cassé pendant le bombardement », raconte rétrospectivement l’intéressé. « J’étais proche de la fin de mon contrat CO, mais « heureusement » j’ai signé avec Agen deux semaines plus tôt. J’ai fait toute ma rééducation au SUA, ça s’est bien passé pendant les 7 premiers mois, mais ensuite tout s’est mal passé quand j’ai recommencé à courir. Le genou était très enflé et douloureux à cause de l’inflammation causée par le cartilage.
« J’ai choisi de signer à Biarritz, car je rêvais de jouer avec mon idole Serge Betsen »
Malonga consulte alors plusieurs spécialistes à Toulouse, Lyon et même à Vitoria-Gasteiz en Espagne, où il rencontre le chirurgien Rafael Nadal. « J’ai financé moi-même cette opération de dernier recours en Espagne, elle a coûté environ 7 000 €. Le chirurgien m’a promis une régression au bout de 3 mois, mais les piqûres n’ont pas aidé… Et comme je n’avais pas joué ni joué depuis plus d’un an et demi, les dirigeants d’Agen ont engagé une procédure de licenciement pour incapacité de travail. J’ai vu la médecine du travail qui m’a trouvé inapte à jouer au rugby dans toutes ces galères. Aujourd’hui, il est enfin laissé seul par son genou têtu et sait d’abord « ce qu’il ne faut pas faire pour réveiller la douleur ».
Steve Malonga, né au Plessis-Trévise (Val-de-Marne) d’un père congolais et d’une mère roumaine, a grandi jusqu’à l’âge de 5 ans à Noisy-le-Grand (Seine-Saint-Denis) puis à Palaiseau (Essonne), A 10 minutes de Massa où le rugby tardif a commencé. « J’ai commencé à l’âge de 14 ans en suivant mon ami Ishmael qui a rejoint le RCME. Je n’étais pas trop pressé au début, mais il a vraiment insisté, alors j’y suis allé. Dès mes premiers entraînements avec Alain Gazon, j’ai aimé ça et j’ai eu envie de faire carrière dans le sport alors que je ne connaissais rien à l’ovale jusqu’alors. J’ai rapidement fait des sélections départementales et régionales où je suis passé de deuxième à troisième car je n’étais pas assez grand et fort pour jouer dans la cage. »
Après les 4 premières saisons au RCME, Steve Malonga rejoint le Pôle France au CNR de Marcoussis et la promotion de « Robert Paparemborde » (2003-2004), aux côtés de Lionel Beauxis, Damien Chouly, Loïc Jacquet, Yohan Montès, Sébastien Tillous-Borde ou encore Fabien . Cibray et Arnaud Héguy. A 18 ans, il décide également de rejoindre Biarritz, qui accapare alors les premiers rôles sur la scène nationale et continentale, à la tête d’une recrue ambitieuse, dont avec Thierry Dusautoir, Imanol Harinordoquy, Damien Traille, Thierry Dusautoir, Olivier Olibeau, Benoît August et Benoît Lecouls.
J’ai visité le Stade Français, le Stade Toulousain et Biarritz, mais comme cela ne me disait rien de rester en région parisienne, j’ai décidé de passer au BO car il y avait beaucoup de bons joueurs. La troisième ligne mettait notamment en vedette mon idole Serge Betsen avec qui je rêvais d’évolution, mais aussi Thomas Lièvremont, Imanol Harinordoquy et Christophe Milhères. »
Surnommés « Galactiques », les Biarrots étaient alors considérés comme l’un des favoris du championnat et comptaient de nombreux internationaux actifs (Harinordoquy, Traille, Betsen, Yachvili, Brusque, Thion, Marlu) ou futurs internationaux (Couzinet, Bousses, Olibeau, Dusautoir, Dupuy , Tillous-Bordes, Lacroix). Malgré une concurrence féroce « qui ne lui fait pas peur », Malonga parvient à se faire une place sous le soleil de Biarritz. La pré-saison se passe bien, j’ai fait de bons matchs amicaux, puis Thomas Lièvremont s’est blessé. Résultat, j’ai 5 ou 6 matchs convaincants dans le top 14, mais j’ai quand même des blessures qui ralentissent ma progression.
« J’avais une proposition de Bourgoin, mais quand j’ai visité la ville, ça m’a refroidi »
Même s’il ne participe pas aux phases finales sous les ordres de Patrice Lagisquet et Jacques Delmas, Steve Malonga devient le double champion de France avec BO (2005 et 2006) et comme le 24e homme survit à la finale de la Coupe d’Europe, l’Europe a perdu à Munster au Millenium Stadium de Cardiff .
Après 4 saisons et 41 matchs aux Rouge et Blanc, il n’est pas arrêté par le BO à l’issue de la saison 2007-2008, malgré une pétition des supporters basques et décide de poser ses valises à Castres : « J’ai aussi reçu une offre de Bourgoin-Jallieu, mais quand j’ai visité la ville, ça m’a un peu rebuté. Les chefs ont essayé de me montrer de bons endroits, mais ma femme et moi nous sommes dit que c’était impossible (rires). »
« J’avais un stress ou une façon d’appréhender la compétition qui m’a rongé… »
Recruté sous la direction sportive de Jean-Phillippe Witness et d’un trio d’entraîneurs Alain Gaillard, Jeremy Davidson et Mark McCall, Malong s’est bien amusé au CO et a trouvé de la constance dans ses performances avant que le duo Labit-Travers ne prenne les rênes dans le Tarn. club la saison prochaine. « J’ai beaucoup moins joué depuis 2009, mais j’ai quand même aimé gérer deux Lolos. Ils ont réussi à relancer le groupe. « L’aventure castresaise dont vous connaissez déjà l’épilogue.
Rapidement remarqué par les chaînes fédérales, il perd sa première finale de Coupe du monde U-19 face à la Nouvelle-Zélande avant de devenir champion du monde U21 en France deux ans plus tard. Lors de ces Championnats du monde juniors 2006, il dispute les deux premiers matchs des Bleuets, face au Pays de Galles et à l’Afrique du Sud, avant de subir une fracture du cou qui l’empêche de terminer la compétition et de disputer la finale face au Baby Boxing à Clermont-Ferrand.
3 ans plus tard, il est sélectionné par Olivier Magne pour rejoindre France A et participe à une tournée estivale en Roumanie. « Avant d’y aller, je voulais jouer un gars sérieux, alors j’ai pris un bain. Sauf quand je m’étirais dans la baignoire, j’avais une contracture musculaire. J’ai passé deux semaines sous tétrazépam et j’ai joué les 3 matchs (contre l’Italie, la Roumanie et l’Ecosse) en 10 jours en Roumanie, le pays d’origine de ma mère. La télé locale est venue m’interviewer aussi, mais ça fait 4 ans que je ne parle pas roumain alors je leur ai dit ce que je pouvais… (rires). Mais aujourd’hui, je parle couramment le roumain. »
International U18, U19, U21 et France A, Steve Malonga a connu toutes les équipes de France sauf les plus grandes. Ce qui est un regret inévitable. « Absolument… Je pense que j’aurais pu porter le maillot bleu car je connaissais toutes les sélections jeunes. Je sentais que la porte était ouverte, mais des blessures m’ont arrêté… Des blessures qui n’ont jamais été accidentelles. Peut-être que je me sentais stressé ou un moyen de capturer la rivalité qui me tourmentait et ne me permettait pas d’enchaîner les jeux pour arriver à ce graal. »
Aujourd’hui, le père de deux enfants, Steve Malonga, ne troquerait son quotidien à Castres pour rien au monde, et il regrette d’avoir quitté la région « no fun » de Paris autrement que de rentrer chez lui. où vivent encore ses parents.
Comme au stade Pierre-Fabre l’an dernier, l’ancien ferrailleur du Top 14 sera présent au 2e trophée Ibrahim-Diarra organisé le 19 août au stade Sapiac (Montauban) en mémoire de son ami et coéquipier. Castrese, troisième ligne de 2009 à 2012, a tragiquement disparu le 18 décembre 2019. « Comme tous ses proches, j’ai été très affecté par sa mort car elle a été rapide et rapide comme l’éclair. Pour apaiser la douleur, je me dis souvent qu’Ibou a profité de sa vie avec son sourire légendaire et éternel et qu’il a aussi eu une belle carrière. C’était vraiment un type bien », résume Steve Malonga, qui pratique le rugby mais n’oublie pas ses anciens frères joueurs.