Sauvez Venise des vagues, la course contre la montre est lancée

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Written By Sophie Ledont

Rédactrice passionnée qui a vécu dans plus de 25 pays toujours à la recherche de la dernière information.

Venise sera-t-elle engloutie par les flots en 2100 ? Pour éviter ce scénario catastrophe évoqué par les scientifiques, la ville du Doge tente de sensibiliser les jeunes générations à la protection du lagon – un écosystème très fragile menacé par le changement climatique.

« Acqua alta », une marée particulièrement haute, inonde régulièrement la célèbre place Saint-Marc, un phénomène qui amuse les touristes mais menace les fondations des anciens palais de la Sérénissime, un site du patrimoine mondial de l’UNESCO.

Lorsque l’Unesco a menacé d’inscrire Venise sur la liste du patrimoine mondial en voie de disparition en 2021, la cité lacustre y a échappé de justesse grâce à l’interdiction faite aux grands navires de croisière d’entrer au cœur du lagon.

Pour sauver Venise, l’Unesco, liée au groupe de luxe Prada, a lancé mardi une initiative visant à initier les jeunes élèves de trois à six ans aux secrets de la lagune.

Sur l’île de Torcello, située au nord de la lagune et dont les rives sont érodées par les vagues créées par les bateaux à moteur, s’est tenue la première leçon en plein air de ce programme éducatif, le « Lagoon Children’s Garden », avec ses propres zones marécageuses.

Poissons en papier mâché recyclé, échantillons d’eau de mer, dessins reproduisant les couleurs de la nature… un petit groupe d’environ quarante-cinq enfants enthousiastes a tenté de s’approprier le lagon.

« Nous voulons que les enfants apprennent à observer la nature et le lagon, à le connaître, à l’aimer et à mieux le protéger », a déclaré à l’AFP Francesca Santoro, coordinatrice du programme initiative de l’AFP. L’Unesco à l’océan.

Georg Umgiesser, directeur de recherche à l’Institut des sciences marines de Venise (ISMAR-CNR), juge ce projet pédagogique utile car « il ne suffit pas de montrer de simples graphiques illustrant l’élévation du niveau de la mer ».

« En raison de l’affaissement de la terre de Venise et de l’élévation du niveau de la mer, le niveau moyen de la mer a augmenté de 30 cm au cours des 150 dernières années, et d’ici la fin du siècle, il devrait encore augmenter de 50 cm. cm », explique-t-il à l’AFP.

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La place Saint-Marc, située dans la partie la plus basse de la ville, est la première à être inondée, et « en 2100 la moitié de Venise sera peut-être sous les eaux », craint cet océanographe allemand qui vit à Venise depuis 40 ans.

Depuis octobre 2020, un système de digues artificielles appelé MOSE (Moïse en italien) est activé dès que la montée de la mer Adriatique atteint le seuil d’alarme de 110 cm.

Ce système, mis au point dans les années 1980, avant l’accélération du réchauffement climatique, suffira-t-il à empêcher Venise d’être engloutie ?

Selon M. Umgiesser, ce mécanisme peut atteindre ses limites. « MOSE a été conçu pour s’arrêter au maximum 50 fois par an. Si l’élévation du niveau de la mer se poursuit à ce rythme, à partir de 2100, il faudrait qu’elle soit déclenchée 300 à 400 fois par an. »

A cette époque, la lagune serait effectivement fermée, empêchant les échanges d’eau avec la mer, indispensables au maintien de la biodiversité.

Une autre solution demeure, qui consisterait à « surélever le paysage vénitien de 30-50 cm en injectant de l’eau de mer dans son sous-sol », explique-t-il. Mais un tel scénario est encore loin.

En attendant, Jane da Mosto, directrice vénitienne du groupe écologiste We are here, compte sur les marais salants comme barrières naturelles pour ralentir l’acqua alta et amortir les courants.

La restauration de ces zones humides, détruites par le changement climatique et l’urbanisation, serait une solution naturelle pour sauver Venise et sa lagune, a-t-il déclaré.

« Les sels agissent comme des éponges et peuvent donc ralentir les courants, réduire l’énergie des vagues et donc faire baisser les niveaux d’eau », explique à l’AFP un spécialiste de l’environnement.

« C’est une course contre la montre. Nous devons agir maintenant. Nous sommes dans une urgence climatique, une catastrophe est déjà en train de se produire », a-t-il prévenu.