Soul Flyers : ils sautent… puis s’écrasent dans l’avion pendant le vol

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Il s’agit de leur deuxième saut de la journée depuis la ligne située juste en dessous du sommet de la Jungfrau, une montagne culminant à 4 158 mètres dans les Alpes suisses. Ils attendent le passage du petit avion de tourisme et le copilote monte alors dans le vide, armé seulement d’une wingsuit – une combinaison avec des ailes qui permet de « voler » dans les airs – et d’un parachute de – voiles. . Leur but : sauter, se rapprocher de l’avion et rentrer dedans en plein vol. Ces deux airs « fous », sponsorisés par Red Bull, sont Fred Fugen et Vince Reffet, surnommés les Soul Flyers. A leur actif, quelque 7 000 sauts en freefly (chute libre) et cinq titres de champion du monde dans cette discipline.

L’idée est née dans l’esprit de ces deux Français en hommage à Patrick de Gayardon, l’inventeur de la wingsuit moderne, décédé en 1998 à Hawaï lors d’un accident de parachute. Un an plus tôt, en 1997, il avait réussi un exploit unique : sauter avec ses ailes d’un avion en l’air, planer un moment et… remonter dans l’avion. Une cascade reproduite une seule fois en 20 ans, par un Brésilien. Les Soul Flyers se sont contentés de répéter cette performance mais en ajoutant une difficulté supplémentaire : le base jump part d’une montagne. La vidéo de leurs exploits a été vue plus de 50 millions de fois en moins de 24 heures. Grazia les a rencontrés pour essayer de comprendre comment cela est devenu possible.

Racontez-nous votre saut comme vous l’avez vécu…

Vince Reffet : Nous avons été descendus en hélicoptère au plus près du sommet de la Jungfrau pour économiser toute notre énergie pour le saut. Nous avions des repères visuels pour fixer l’heure et étions en contact radio avec le copilote. Peu de temps avant, nous avions fait notre premier saut et cela n’avait pas grand-chose à voir avec cela. Mais j’ai touché la porte, vous pouvez le voir sur la vidéo. Un de nos amis nous a dit : « Un à voir, un à faire ». Une heure plus tard, nous sommes revenus à cette idée et cela a fonctionné.

Fred Fugen : Lorsque nous étions en place et que nous avions la tonte, nous avons décollé et commencé à descendre, en survolant le glacier, à environ 150 km/h, en attendant que l’avion soit à notre hauteur. Nous nous sommes rapprochés petit à petit jusqu’à nous retrouver à un peu plus de 5 mètres de l’avion. Ensuite, il fallait passer un peu en arrière et sous le Pilate. Nous avions quelques repères visuels pour cela : la plaque d’immatriculation et les volets de l’avion, le coin de la porte ouverte… Une fois en place – entre 800 et 1000 mètres au-dessus du sol en moyenne, et au bon moment, tous nous avait à faire était Begin. Pour cela, il fallait redresser le dos, coller un peu les épaules et étirer la wingsuit pour gagner un peu plus de vitesse. Puis, d’un seul mouvement, nous étions de retour dans l’avion et il ne restait plus qu’à rentrer dans l’avion en se balançant un peu. L’écume à l’intérieur du Pilatus adoucit notre arrivée un peu violente. La difficulté était d’avoir suffisamment de vitesse pour traverser la dépression créée autour de la porte de l’avion et ainsi revenir sans se poser. Tout se jouait sur un fil.

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En tout, cela dure combien de temps ?

Vince Reffet : Nous avions 7 minutes de vol pour repartir en hélicoptère. Pour la descente en rappel jusqu’au lieu de saut, il faut compter 20 minutes. On attend un peu l’avion et puis, entre le moment où on saute dans le vide et le moment où on remonte dans l’avion, il y a 1 minute 30. Ça passe tellement vite quand on y pense après… des mois de préparation , vous vous sentez mal au ventre, rumination, visualisation… et puis en 30 minutes, le projet est fait. C’est fou.

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Comment vous êtes-vous entraînés ?

Fred Fugen : C’est quatre mois d’entraînement à plein temps. Nous avons fait une centaine de sauts. Cet été en Espagne, où l’avion est habituellement basé, nous nous sommes entraînés à sortir et à rentrer dans l’avion. Ils y sont parvenus une vingtaine de fois proprement mais ils ont aussi frappé à plusieurs reprises la porte de l’avion. Ce geste d’entrer dans l’avion, on le fait assez instinctivement mais on a aussi envie de se faire violence et d’aller contre toute logique pour se lancer à la rencontre d’un avion en plein vol. C’est un vrai travail mental, évidemment soutenu par des points de visée et notre habitude de la chute libre. Ce qui était aussi rassurant, c’est qu’on savait qu’on avait de la hauteur pour ouvrir le parachute et descendre tranquillement. Une fois tout cela en place, nous avons fait quelques tentatives dans les Alpes. Il fallait trouver les repères entre les températures plus basses, les montagnes autour, les vêtements de base jump, etc. [la combinaison et une voile au lieu de deux et sans le système de secours d’un saut en parachute classique, ndlr]. Nous avons fait la première tentative qui s’est jouée début octobre mais la météo n’était pas optimale. Et puis fin octobre, c’était la bonne.

Comment cela se passe pour calculer les trajectoires et parvenir à retrouver l’avion à l’endroit prévu ?

Vince Reffet : On peut faire des calculs mathématiques, imaginer des trajectoires… en fait, c’est notre expérience, celle du pilote et copilote, Philippe Bouvier et Yves Rossy, qui a permis de faire vivre ce projet. Nous savions que le Pilatus, ce modèle particulier avec cet environnement particulier, est aujourd’hui le seul avion adapté à ce type de record. Car il est le seul à pouvoir freiner en descente comme il le fait. Nous avons pris contact avec Philippe et voulions nous asseoir avec lui pour voir. Nous avons sauté dans la wingsuit de l’avion et avons pris notre trajectoire. Quelques dizaines de secondes plus tard, on entendait dans le micro qui était en place, à notre droite. Nous tournâmes tous les deux la tête et découvrîmes le Pilatus, juste à côté de nous, volant à notre hauteur. Là, nous savions que nous avions le bon avion et le bon pilote. Ensuite, lorsque nous atteignons les Alpes suisses, il s’agit avant tout de synchroniser les repères visuels. On sait qu’on va descendre le glacier en 45 secondes, que l’avion doit nous rejoindre quand on passe par des endroits aussi familiers, etc. Avec nos nombreux sauts, nous savons instinctivement comment nous assurer que toutes les étoiles s’alignent au bon moment. Après cela, la météo doit être avec nous. Ce fut le cas alors.

Vous avez sauté en wingsuit à 10.000 mètres d’altitude au-dessus du Mont-Blanc, fait du basejump depuis la Burj Khalifa à Dubaï, volé en formation avec la patrouille de France… vos projets sont toujours un peu plus fous mais votre sport est considéré particulièrement dangereux. Comment vivez-vous cela ?

Fred Fugen : Le problème avec les wingsuits en particulier, c’est que le sport est devenu de plus en plus « facile » à pratiquer. Les technologies se sont tellement améliorées qu’elles deviennent de plus en plus accessibles. On voit des jeunes faire une petite semaine de stage en parapente puis se lancer dans le basejump avec une wingsuit ! Les ailes se gonflent maintenant si facilement et vous mettent dans la bonne position que vous pouvez faire le premier saut assez rapidement. Le problème est que les gens ne fixent pas de limites lorsqu’il y a tant de paramètres qu’ils ne contrôlent pas. L’autre jour, un ami a arrêté un homme qui s’apprêtait à sauter alors qu’il ne tenait pas correctement le harnais. Il se suiciderait à coup sûr. Mais son seul souci était de savoir si sa GoPro serait capable de diffuser ses exploits sur YouTube et les réseaux sociaux… Souvent ce sont des personnes inexpérimentées qui prennent des risques téméraires et non calculés qui se tuent. Nous avons 20 ans de parachutisme et 15 ans de pratique de wingsuit derrière nous. Nous prenons des risques, oui, mais ils sont mesurés et calculés.

Quel est votre prochain projet ?

Vince Reffet : On a toujours plein d’idées mais on se voit bien voler au-dessus de Paris. On s’imagine sauter et passer au-dessus des Champs-Elysées puis voler vers la Tour Eiffel pour atterrir sur le Champs de Mars. C’est nul ! Vous devez obtenir tout un tas d’autorisations pour que cela se produise. Il peut s’agir d’un long parcours d’obstacles sans avoir à s’y rendre. Mais si c’était facile, nous ne serions pas intéressés.

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