A l’heure où un mouvement se développe dans plusieurs pays du dit « Nord » pour s’opposer à « l’ubérisation » (innovation technologique devenue aujourd’hui synonyme de précarité), les plateformes numériques de transport et de livraison qui sont à l’origine de ce phénomène se multiplient aux USA – pays dits « du sud ». Avec certaines spécificités dues à l’état de développement de ces économies, comme le montre le cas de l’Afrique du Nord en général, et celui du Maroc en particulier.
Dans un article pour l’Observatoire marocain de la souveraineté numérique, publié le 17 février, nous avons fait un bref état des lieux de l’histoire des plateformes de transport au Maroc. En 2015, le géant américain Uber s’est installé dans le pays, mais est parti au bout de trois ans en raison des nombreuses résistances syndicales et juridiques auxquelles il a dû faire face. Une sortie qui, en réalité, n’est pas définitive puisque, en 2019, Uber rachète la plateforme émiratie Careem, qui opère au Maroc depuis 2015.
Depuis, le pays a vu se lancer d’autres plateformes de véhicules de transport avec chauffeur (VTC), qu’elles soient nationales (Roby, Yallah) ou internationales (Yassir, Heetch, InDriver). Selon un documentaire diffusé par la chaîne marocaine 2M, le nombre de chauffeurs travaillant avec les plateformes a atteint 12 000 en 2021. Ce nombre semble augmenter chaque année, en raison de l’augmentation du nombre de plateformes opérant dans le royaume.
Une organisation chaotique
Leur présence dans le secteur du transport de voyageurs au Maroc s’explique notamment par les nombreuses lacunes de ce secteur, au premier rang desquelles le « système d’accréditation ». L’homologation du transport de voyageurs a été instituée au Maroc après son indépendance en 1956. Un dahir, ou arrêté royal, du 12 novembre 1963 définit les conditions et les règles d’organisation de ce secteur.
L’octroi d’une licence de transport – c’est-à-dire, concrètement, l’autorisation d’ouvrir une société, individuelle ou non, spécialisée dans ce domaine ou dans d’autres secteurs du transport (transport de marchandises, maritime, aéronautique, etc.) – ne signifie pas n’est pas un droit réclamable, mais plutôt un privilège accordé par le pouvoir marocain (le roi ou le Maghzen, l’administration marocaine), souvent accordé aux anciens militaires, artistes, sportifs et autres personnalités influentes et sympathisants du régime. Dans certains cas, ce privilège peut également être accordé aux citoyens en situation économique fragile, comme le souligne une circulaire du ministère de l’Intérieur en date du 22 décembre 1981.
La centralisation de ce service public depuis l’indépendance du Maroc s’explique par la volonté de créer un système socio-économique qui renforcerait le régime en affaiblissant l’opposition politique. Le pouvoir marocain a donc construit ce système d’agréments pour maintenir sa suprématie, d’où le contrôle que le ministère de l’Intérieur continue d’exercer sur le secteur des taxis, alors que c’est le ministère des Transports qui doit s’occuper de l’unique propriétaire.
Le monopole d’attribution des autorisations de transport détenu par le ministère de l’Intérieur a donné lieu à une organisation chaotique, préjudiciable à la fois aux chauffeurs (précarisation de l’emploi) et aux clients (difficultés quotidiennes) en raison de l’absence de stratégie de libéralisation du secteur. créer une forte concurrence.
Face au pouvoir et aux VTC, la résistance syndicale n’a pas suffi
Depuis quelques années, les autorités tentent de mettre en place de nouvelles dispositions légales pour réglementer l’activité des chauffeurs. La plus récente de ces tentatives, qui remonte au mois d’avril, vise à mettre en place un ensemble de mesures, parmi lesquelles la possibilité pour les conducteurs titulaires d’un « permis de confiance » et d’une carte professionnelle de bénéficier de contrats de délégation d’autorisation d’exploitation de taxi.
Cette décision a suscité la colère de certains syndicats, qui reprochent aux autorités leur manque de dialogue avec les instances représentatives et déplorent que le pouvoir appartienne aux titulaires des agréments du secteur.
Cette instabilité est aggravée par l’arrivée des plateformes de VTC, perçues comme des acteurs de plus en plus compétitifs qui opèrent dans l’illégalité, dans la mesure où aucun cadre légal ne les autorise à opérer. Ainsi, la résistance syndicale qui perdure depuis 2015 n’a pas empêché ces entreprises de continuer à fonctionner et d’attirer davantage de catégories de chauffeurs professionnels, dont certains chauffeurs de taxi.
Comment les autorités marocaines gèrent-elles cette situation dans un contexte légal qui interdit les plateformes numériques de transport ? A Casablanca, par exemple, l’article 46 de l’arrêté relatif aux conditions d’exploitation des taxis souligne que toute voiture circulant sans licence de taxi sera retirée pour une durée de un à six mois.
Un flou juridique qui profite aux plateformes
Les plateformes de transport, en revanche, se présentent comme des « intermédiaires » numériques. Une définition source de confusion juridique, qui leur a permis d’échapper aux règles auxquelles sont soumises les sociétés de transport traditionnelles des pays du Nord. Ce même scénario se reproduit au Maroc, où sa croissance est importante.
Ce « laisser-faire » de la part des autorités se justifie par les deux « solutions » que semblent proposer les plateformes : la création d’emplois (par exemple, Careem a permis à plus de 5 000 chauffeurs de travailler) et la réponse à un offrir un transport accessible aux citoyens. insuffisant. Par ailleurs, les plateformes mènent des opérations de lobbying auprès des décideurs marocains, comme c’est également le cas en Europe et aux États-Unis.
Nos travaux de recherche sur le phénomène d’ubérisation en France montrent que l’innovation offerte par ces plateformes en matière de transport ne suffit pas à augmenter leur part de marché. L’influence des hommes politiques, par la promulgation de lois favorables ou l’annulation de décrets défavorables, a donc été un axe crucial dans la construction et le maintien de leur hégémonie.
Champions de la précarisation
Les conséquences de ce trouble sont multiples, mais la question de la précarité de l’emploi et de la santé des conducteurs est un sujet très commenté. C’est pourquoi on assiste à un changement sémantique du terme ubérisation, d’une définition centrée sur l’aspect innovant qu’apportent ces technologies de transport à un mouvement régressif en matière de droit du travail.
Les expériences européennes et américaines montrent que ces plateformes décident et modifient leurs politiques concernant les taux de commission, les frais, les lettres d’embauche, etc. sans aucune négociation avec les chauffeurs. Or, ce manque de communication pose la question du droit du travail et, plus profondément, celle du contrôle des données par les géants du numérique.
Uber, qui fait partie de ces entreprises, suscite plusieurs débats sur les objectifs réels de sa technologie de connexion dans le cadre du transport de personnes ou de livraisons. Sa collecte et son utilisation des données personnelles des utilisateurs nécessitent une réflexion sur les enjeux de cette pratique qui, pour certains, est la véritable source de leurs revenus et dont la finalité est encore inconnue.
Les États-nations, désormais menacés dans leur souveraineté par ces entreprises privées « extraterritoriales », doivent réinventer leurs institutions politiques, développer la connaissance technique des infrastructures et des technologies, et réagir à ces mutations numériques accélérées en adaptant leur législation.
De ce point de vue, les réflexions sur la souveraineté numérique au Maroc commencent déjà à déboucher sur quelques décisions de fond, notamment l’interdiction d’héberger des données sensibles à l’étranger. Cette décision peut être considérée comme un grand pas en avant par rapport à d’autres pays africains. Pourtant, le Maroc est encore loin de réaliser un projet politique de reprise en main de sa souveraineté numérique, comme plusieurs pays dans le monde. Ce sont plutôt les unions politico-économiques qui pourraient affronter l’hégémonie des plateformes, d’où la nécessité pour le Maroc de mener un dialogue sur ces questions avec les pays d’Afrique.
Cet article est republié de The Conversation sous une licence Creative Commons. Lire l’article d’origine.
Comment devenir chauffeur VTC en 2021 ?
En résumé pour devenir chauffeur VTC :
- Inscrivez-vous puis passez l’examen de chauffeur de voiture de transport avec chauffeur.
- Faites passer une visite médicale pour attester de votre aptitude au transport public de voyageurs. …
- Demander et obtenir la carte VTC. …
- Choisissez votre statut juridique.
Comment obtenir la carte VTC sans formation ? Cependant, il est possible de passer l’examen VTC sans formation. Pour ce faire, vous devez réussir l’examen en tant que candidat libre. Sachez que pour tenter de devenir VTC, il vous suffit de vous inscrire en ligne à l’examen sur le site de la Chambre des Métiers et de l’Artisanat (CMA) de votre département.
Quel est le meilleur statut pour un taxi ?
Lorsque l’activité de taxi est exercée, en tant qu’artisan, vous pouvez opter pour le régime du microentrepreneur. Le chauffeur de taxi a également la possibilité de louer son véhicule et son permis à une personne physique qui loue des taxis.
Comment bien gérer un taxi ? Pour tenir la comptabilité de son taxi, le chauffeur de taxi libéral doit prendre note des coûts de ses dépenses. À l’aide d’un bloc-notes ou d’une application mobile, vous énumérerez le montant dépensé pour l’assurance, le carburant, les pièces automobiles, l’entretien du véhicule, etc.
Quel est le salaire moyen d’un chauffeur de taxi ?
En tant qu’employé, un « taxi » peut s’attendre à un salaire moyen dans la ville d’environ 1 600/1 700 € par mois. En tant qu’artisans, certains revendiquent des revenus possibles de l’ordre de 3 000/3 200 € par mois.